L'actualité en continu du pays de Brive


Christine Angot: “J’aime demander à mes lecteurs d’être courageux”

A nu. Christine Angot s’est mise à nu durant une heure de temps à l’espace Gazeau, en acceptant d’éclairer son rapport à l’écriture, à la vérité, à l’inceste. 

Le phénomène Angot attise les conflits. On encense ou on déteste, semble-t-il. Toujours est-il que c’est une femme, un auteur, qui intéresse, qui intrigue. A Brive aussi. L’espace Gazeau ne proposait plus un siège de vide durant l’heure qu’a durée la rencontre avec Christine Angot.

De sa première expérience d’écriture à son dernier ouvrage, Une semaine de vacances (Flammarion), l’entretien a permis aux spectateurs de mieux comprendre la complexe et étrange Angot. Lancée dans des études d’anglais et de droit, elle ressent soudain l’irrépressible envie d’écrire au retour d’un voyage raté avec son mari de l’époque. Le papier de chocolat qui traîne fera l’affaire. “A la lecture, mon mari m’a dit que ça ne ressemblait à rien de connu, que c’était incroyable. Je lui demandais de me dire s’il était sûr que c’était bien et pourquoi, quel mot était bien, etc. Ça m’a bouleversée mais j’ai continué. Tout cela m’a fait très peur car dès lors j’ai su que je ne croirais plus à tout ce à quoi je croyais jusqu’à présent. Je savais que dorénavant, il n’y aurait que l’écriture dans ma vie.” Une écriture orale, portée par le souci du dire. “Cela ne m’importe pas de transcrire mais de dire oui.”

Elle est aussi revenue sur la période de malentendu lors de laquelle beaucoup de lecteurs l’ont classée dans le genre de l’autofiction. “C’est attristant de voir qu’on n’arrive pas à se faire comprendre. J’aurais mis en scène un personnage adapté à partir de ma personne, je ne crois pas. Je me sers de ma perception, et non de moi pour écrire.”

Le thème de l’inceste, récurrent dans ses ouvrages, a bien sûr été le gros morceau de l’entretien. “C’est l’interdit fondamental. L’inceste scandalise bien sûr mais une fois qu’on a dit ah la la mon dieu, c’est bien tout. Alors pourquoi quand moi je le traite, ça crée un tel malaise. Précisément parce que je le met en scène. Ce qu’il est intéressant de voir c’est qu’à cause de l’inceste, l’identité de la personne agressée est perdue. L’inceste brouille les repères. Ce qu’il se passe, c’est que le père se refuse à la fille comme père, il refuse de lui transmettre son héritage social, économique ou culturel; le plus simple, pour ne pas être son père, est d’être son amant.”

“C’est quelque chose de complexe, mais aujourd’hui, on dirait qu’on n’a pas de courage. J’aime cette idée d’écrire des textes qui demandent du courage aux lecteurs“, a avancé Christine Angot, visiblement soucieuse d’être la plus claire, la plus sincère possible. La vérité, c’est aussi une notion importante chez l’auteur. “Lors d’un de mes premiers salons, un lecteur m’a prévenue que je courais le risque de la fabrication. Jamais, je le savais.” Et pour rester dans le registre de la sincérité, c’est un peu malgré elle, mais guidée par son souci de vérité, qu’elle a expliqué aux spectateurs le déclic qui a engendré l’écriture de son dernier roman. “En fin d’hiver, un magazine féminin m’avait commandé, à moi et à d’autres auteurs, une nouvelle érotique pour l’été. A priori, ça ne m’intéressait pas mais les 4.000 euros offerts m’ont fait réfléchir. Je me suis dit ok, s’ils veulent une nouvelle érotique, ils allaient l’avoir alors je me suis mise au travail, un travail trop précis et clair pour être érotique, quelque chose qui brûlait les doigts. C’était trop bien pour le magazine. Ce fut le début de mon livre!”

************

Sur ce sujet, vous pouvez également consulter nos autres articles:

Jennifer BRESSAN

Jennifer BRESSAN

Laisser un commentaire

1 × quatre =