Avec style, Alain Mabanckou a inauguré ce matin la série des grandes leçons, nouveau rendez-vous de la Foire du livre de Brive ! Et, que l’écrivain « congolo-français », auteur de Mémoires de porc-épic, prix Renaudot 2006, parle de la littérature française ou de la sape, c’est de la haute couture !
Ce matin, Alain Mabanckou a revêtu non pas la casquette, mais le chapeau, et chic avec cela, de professeur. Un statut que connaît bien cet écrivain, professeur de littérature francophone à la très côté UCLA, université de Californie à Los Angeles depuis 2006 et élu au Collège de France l’an dernier à la chaire de création artistique. « Cela ne m’intéresse pas de parler aux spécialistes. » Ce qui lui importe, c’est « la vulgarisation, au sens noble du terme ».
C’est ce qu’il a fait ce matin sur différents thèmes dont la francophonie ou les dictatures africaines, traitées de façon peu complaisante mais toujours développées avec talent et humour que l’auditoire a su apprécier. Parmi les morceaux les plus savoureux et inattendus de son intervention figurent la littérature française et la sape, toutes les deux une affaire de style.
« La langue française n’est pas en décadence. Je suis toujours fasciné par la capacité des Français à convoquer l’auto-flagellation. » A cette résignation gauloise, l’écrivain, ancien président de la Foire du livre de Brive, a opposé l’argument de sa classe de littérature françaises bondée à Los Angeles et même servi un exposé des principaux courants artistiques français qui se sont succédé depuis le XIXe siècle: le romantisme, le réalisme, le naturalisme, les parnassiens, le symbolisme puis le sur-réalisme. Pour Alain Mabanckou, si tant d’écrivains français aujourd’hui se rapportent aux faits divers , c’est parce que « les politiques ont décapité le réel ».
Pour autant, il convient selon lui de « ne pas perdre de vue le rêve, de continuer de croire qu’un autre monde est possible. En rentrant dans un livre, on a envie que l’auteur nous propose un monde. Si je m’empare de la réalité, c’est pour en faire mon monde. » Il appelle cela la « littérature panachée » et aussi « de couture ». Et ce n’est sans doute pas un hasard.
« Vous êtes un des rares écrivains à exiger la même flamboyance des mots et des habits, quoiqu’aujourd’hui ce soit assez raisonnable », a noté le journaliste Christophe Ono-dit-Biot. L’occasion pour Alain Mabanckou de reparler de son styliste Jocelyn le Bachelor qui cite de Vigny, Hugo et Chateaubriand. « Il ne vend pas que des habits, mais aussi la littérature française. » Et l’écrivain de vanter alors la sape, de détailler le charme d’une doublure de manteau surpiquée et de faire la chasse à cette veste à trois boutons qu’un ignorant portait tous fermés: « Quelle erreur ! C’est scandaleux! » On a le style, ou on ne l’a pas.
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