À l’ombre d’un parasol, kaki de circonstance, Mickaël Delas cisèle les derniers détails du bas relief en hommage à celui dont la caserne porte le nom. Indifférent aux répétitions et démonstrations de combats qui s’enchainent sur la place d’armes en vue de la journée portes ouvertes de samedi, il est encore pour quelques jours tout à son œuvre, affinant un trait, creusant au millimètre l’imposant bloc de près de 3 mètres et 4 tonnes.
La scène représente un officier menant ses hommes à l’attaque hors d’une tranchée sous un déluge de feu. Une représentation qu’il a travaillé en anamorphose, technique par déformation d’images. « Il faut être bien en face pour saisir toute la perspective de la scène. »
L’ex-sergent du régiment, auparavant tailleur de pierre et sculpteur ornemental, a découvert il y a un an, alors qu’il allait négocier son retour à la vie civile, l’héroïsme de cet ancien chef de corps, mort au combat le 26 avril 1915 sur la tranchée de Calonne aux Éparges, dans la Meuse.
Frappé de 4 balles ennemies
« Il a été frappé de 4 balles ennemies, ce qui témoigne du courage qu’il a fallu pour faire face alors qu’il était blessé et il a continué à se battre. Ce jour-là, sont morts avec lui 3 de ses officiers et 150 de ses hommes. » Son cœur d’artisan comme de militaire a été happé par ce fait historique.
« J’ai fait des recherches sur les costumes, l’armement, j’ai retrouvé la fiche de décès avec tous ses prénoms Alfred Louis Auguste… J’ai découvert que son successeur, le colonel Jean Joseph Paul Bessan était lui aussi mort au combat quelques mois plus tard, le 25 septembre 1915… »
Mickaël Delas a mené un travail méticuleux pour être au plus près du sujet. D’autant que pour représenter le visage du personnage, le tailleur de pierre ne disposait que d’une seule photo médaillon, celle qui ornait l’ancienne et modeste stèle située à l’entrée de la caserne. « Elle ne le mettait pas suffisamment en valeur, surtout au vu de son sacrifice. »
L’artisan a choisi la Lavoux, une pierre de Poitiers, dont la blancheur rappelle celle du bison, emblème du régiment, dont un spécimen orne la place d’armes. « Elle permet d’obtenir une sculpture très fine pour soigner les détails », explique l’artisan. « Toute la taille a été faite à la main avec des petits outils, des cure-dents à l’échelle du bloc. À la pierre vont être ajoutés des éléments en métal : les barbelés, la baïonnette, une dragonne… »
Inaugurée pour la journée portes ouvertes
L’œuvre commandée par le 126e régiment d’infanterie a ainsi permis à l’ancien sergent de démarrer son entreprise. « J’en suis très fier et c’est une façon de continuer à servir au 126. » La stèle sera inaugurée en ouverture de la journée portes ouvertes, ce samedi 7 juin de 10h à 19h.
Voilà 8 ans que le régiment n’avait ouvert ses portes. Une invitation à ne pas manquer. Il y aura des animations, démonstrations de combat, simulateurs, exposition de matériel, popotes des compagnies… Le tailleur de pierre sera lui aussi présent pour montrer et expliquer en documents et vidéo l’évolution de l’œuvre. L’entrée est gratuite. Une soirée dansante (5 euros à régler à l’entrée sur place) clôturera la journée de 21h à 2h. Consultez notre précédent article Les Bisons vous invitent chez eux.
